Qu’est-ce qu’un « jeu mobile » ?

La quasi-omniprésence des supports mobiles dans notre quotidien, ainsi que leur évolution technique exponentielle, ont permis l’apparition de nouveaux types d’application ludique.

L’expérience utilisateur offerte par ces applications (en dehors du jeu lui-même) est intimement liée au type d’application et au contexte dans lequel elle est utilisée. Dans ce deuxième article sur les jeux mobiles, nous allons tenter de les catégoriser en fonction de leur utilisation.

Les jeux mobiles

Evolution des jeux mobiles

Par « jeu mobile », nous entendons l’ensemble des applications à visée ludique proposées sur smartphone et/ou sur les tablettes.

A l’origine, les téléphones portables n’étaient pas destinés à accueillir des applications ludiques. Pourtant, aujourd’hui les jeux constituent une part essentielle des usages en mobilité.

Comme les jeux sur console portable, les applications ludiques sur smartphone et tablette se sont adaptées aux contraintes de connectivité. Les supports mobiles n’offrent pas les mêmes moyens d’interaction que leurs homologues fixes. Les éditeurs de licences connues, aussi bien que les petits studios indépendants, ont du adapter leurs pratiques pour proposer des interfaces utilisables et adaptées au contexte de mobilité.

Aux débuts du jeu mobile, les touches et boutons étaient plus ou moins nombreux et répartis un peu partout sur le téléphone. Mais avec le temps, les modes d’interaction se sont standardisés et le tactile s’est imposé comme la norme en matière de jeu mobile. 

Nous détaillerons plus amplement les aspects liés à l’expérience utilisateur des jeux mobile dans un autre article de cette série. Pour l’heure, évoquons les applications ludiques qui sortent du cadre simple de « jeu mobile ».

Le portage mobile

Une multitude de support

Pour conquérir de nouveaux joueurs, nombre de jeux vidéo à succès se sont tournés vers le support mobile. Historiquement, les jeux amenés sur divers supports avec la volonté de garder un gameplay proche de l’original sont appelés « portages ». Pour réussir un portage mobile, il est nécessaire de comprendre le support vers lequel le jeu migre et de s’y adapter. Certains aspects de l’activité en lien avec le support amènent des modifications plus ou moins profondes du jeu. Ces modifications peuvent être liées :

  • A l’interactivité de l’interface
  • Au contexte d’utilisation 
  • Aux utilisateurs types
  • Aux performances du support

Ces différentes contraintes peuvent nécessiter une adaptation du gameplay, des commandes, du système économique ou encore des graphismes du jeu (généralement revus à la baisse). 

Pour le modèle de jeu, les producteurs optent souvent pour un système « free to play » avec des micropaiements offrant divers avantages, comme des améliorations cosmétiques ou une progression accélérée.


Un support de jeu mobile

Pour illustrer les changements effectués lors d’un portage sur mobile, prenons l’exemple du jeu multi-joueurs à succès « League of Legends: Wild Rift ». Avec des interactions limitées mais exigeantes, les modifications sont intéressantes à observer. En adaptant le gameplay, la durée moyenne des parties a été réduite. Cette réduction profite notamment aux utilisateurs qui disposent d’un temps limité. Les contrôles ne pouvant être portés tels quels sur mobile, un joystick virtuel a été spécialement conçu pour les déplacements. Quant au ciblage, il est majoritairement automatique contrairement à la version PC.

Dans l’ensemble, la différence de profils de joueurs et le manque de précision des contrôles justifient que la version mobile soit indépendante de la version PC. Pourtant, s’agissant d’un jeu compétitif où l’équité des chances leur parait essentielle, certains joueurs désirent conserver un niveau de capacité équivalant quel que soit le support. Pour améliorer leurs performances sur mobile, certains joueurs ont recours à des accessoires ajustables au support mobile, comme des gâchettes, des socles ou des joysticks physiques qui permettent d’accroître la précision des contrôles et de rappeler les sensations de jeu sur console ou PC. Il arrive aussi que des joueurs émulent l’application mobile sur l’ordinateur pour jouer avec leur clavier et souris, toujours dans l’optique de retrouver une expérience proche de l’originale, et ce même si le jeu original est disponible sur ordinateur 

Les jeux « cross-platform »

Comme nous l’avons suggéré plus tôt, les jeux mobiles issus de licences peuvent exister sur divers supports, plus ou moins puissants et/ou jouables en ligne. Pour différentes raisons (qu’il s’agisse de l’augmentation de la puissance de nos appareils mobiles, ou d’une volonté des producteurs de développer davantage de jeux portables sur différents supports) une nouvelle fonctionnalité nommée le « cross-platform » est apparue qui permet de jouer à un même jeu sur différents supports, selon ses envies. Il est donc encore plus important d’adapter l’interface aux différents supports, afin que les performances des joueurs y restent comparables.  

On peut par exemple évoquer les TCG (Tactical Card Game), ou certains jeux du type « auto-chess » qui sont de bons exemples d’adaptation du gameplay. Ces formats permettent de compenser les latences et la vitesse d’exécution sur mobile, ce qui est très apprécié par les joueurs.

Sur un autre plan, Il existe beaucoup de contrôles sur PC/Console qui ont été adaptés pour pouvoir être transposés en tactile. Ici, pas de gestion de la vue en 3D mais des taps (clic vs. pression tactile) ou des drag&drop (laisser le clic enfoncé vs. maintenir la pression sur l’écran). Ces deux manières d’interagir avec l’interface (souris ou tactile) permettent de maintenir une cohérence dans l’expérience du jeu en raison de leur ressemblance sur le plan de l’interaction.

Pour rester sur cet exemple des TCG, il faut noter que le gameplay général peut rendre l’interaction plus ou moins adaptée au support. Par exemple, des parties trop longues peuvent s’avérer inadaptées aux supports nomades, en raison de variations liées à l’environnement et au contexte d’utilisation.

Toujours concernant les jeux cross-platform : d’autres licences ont réussi à permettre une ressemblance du gameplay, malgré la différence de support.  Citons par exemple « Genshin Impact », un OVNI qui a eu un grand succès à sa sortie avec son modèle free-to-play et adapté aussi bien au PC qu’au support mobile.  A noter également, si un jeu existe sur différents supports on offre généralement la possibilité aux joueurs d’accéder à leur compte ou de sauvegarder leur progression de façon transverse, depuis différents appareils. Une action lancée depuis un ordinateur peut ainsi être poursuivie sur mobile lors d’un déplacement, et inversement.

Les applications dites «  support de jeux »

Un autre type d’application mobile à visée ludique peut être caractérisé comme support de jeux. Il ne s’agit pas d’un jeu en soi, ce type d’application dépendant d’un autre logiciel généralement conçu pour PC ou console de salon. Dans cette catégorie particulière, on peut prendre comme exemple « WoW-Compagnon » ou encore « Fallout 4 Pip Boy ».

Un regard rapide sur ces deux exemples permet de constater deux façons différentes d’utiliser le support mobile en complément d’une application ludique sur support fixe :

  • Dans le premier cas, l’application dédiée au MMORPG le plus connu au monde « World of Warcraft » propose un récapitulatif des statistiques relatives aux différents personnages que vous possédez sur votre compte. Elle permet aussi de programmer des expéditions et de gérer vos bases présentes dans les dernières extensions du jeu. 
  • Dans un tout autre registre, « Fallout 4 Pip Boy » propose d’utiliser le mobile pour gérer les menus du jeu en parallèle, voire à distance du jeu solo. 

Dans le premier cas on peut observer une fonction de support qui profite des avantages des mobiles et qui peut se rapprocher des jeux cross-plateforme, à la différence que l’application ne permet de réaliser qu’une partie des actions possibles sur le jeu original.  Le gameplay reste cependant irréalisable en temps réel.

Dans le deuxième cas, on retrouve aussi les limites du support mobile qui ne peut assumer qu’une partie restreinte des actions du jeu. Cependant, elle n’est utilisable qu’en parallèle du jeu sur support fixe. Dans le cas présent, il s’agit de la gestion du personnage et de son inventaire, une fonction clé qui est rendue moins efficiente étant donné que le joueur doit quitter son écran principal des yeux pour se concentrer sur son écran mobile avant de revenir à son écran principal. Autant dire qu’au-delà d’un certain temps, la majorité des joueurs ont abandonné ce système pour revenir à l’interface d’origine.

Au delà du support mobile

A travers cette classification, nous pouvons distinguer différentes approches dans la conception de ces applications ludiques qui peuvent amener à des résultats, pouvant sembler proches, mais très éloignés dans le ressenti et donc dans l’expérience qu’en tirera le joueur. Ces variations peuvent se retrouver à plusieurs niveaux dans les exemples que nous avons présentés :

  • Les joueurs ayant recours à des outils supplémentaires dans le but de retrouver une interaction plus proche du support d’origine dans le cas des portages sur mobile. 
  • Du choix de certains joueurs d’opter pour un support fixe ou mobile pour leur jeu préféré en fonction de leurs besoins ou attentes vis-à-vis de ce dernier, dans le cas des jeux cross-plateforme. 
  • Ou encore des applications de support de jeux dont le succès dépend de la qualité de la réponse aux besoins qu’elles offrent aux joueurs, en exploitant ou non les avantages nomades du support mobile.

Au final, la compréhension du support mobile et de ses spécificités est centrale pour offrir une expérience et une jouabilité optimale. Par conséquent, les choix de conception à l’origine de l’application auront un fort impact sur l’expérience utilisateur que proposera le jeu. Maintenant que nous avons identifié ce que nous appelons un jeu mobile, nous pourrons continuer de décortiquer ses spécificités en ayant à l’esprit uniquement ce genre d’application dans son sens le plus strict.

Auteur/Autrice

  • Arthur Mas

    User Researcher, UX Designer - Issu d’une formation en psychologie et ergonomie, Arthur s'intéresse tout particulièrement à la conception d’interfaces centrées utilisateur, qu’il s’agisse de proposer un design, d'optimiser la performance, l’efficience ou la jouabilité. Il se positionne principalement sur les avantages et les risques liés à l’utilisation des NTIC, et sur la persuasion technologique. Il privilégie pour cela une approche systémique et holistique, intégrant toutes les composantes de l’expérience utilisateur.

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